La protection de la nature : une action à la portée de tous

Dans cette série d'articles dédiée au monde du droit, Hyzaekû souhaite vous partager des outils permettant d’œuvrer avec sérénité et clarté en faveur de la préservation de la Nature.

Face à l'explosion des textes de loi, il est parfois délicat de parvenir à trouver le chemin de l'action pacifiée. Seulement, de merveilleux outils ont été créés afin de, chaque jour, rendre grâce à Dame Nature et nous permettre d'agir en sa faveur !

Aujourd'hui munis de notre boussole de juriste et de notre sac à dos d'explorateur, nous allons partir à la découverte du Plan Local d'Urbanisme (PLU) et mettre en lumière la notion d’Espace Boisé Classé (EBC). Nous allons découvrir comment ce document vous permet d'agir durablement et efficacement en faveur de la protection des arbres.

 

Le PLU, qu’est ce que c’est ?

 

Le Plan Local d’Urbanisme (PLU) est un document de planification à l’échelle communale ou intercommunale fixant « les règles générales et les servitudes d’utilisation du sol ». Concrètement, c'est une synthèse de l’ensemble des normes qui s'appliquent au territoire de votre commune. Ce document va notamment :

- baliser et définir les différentes zones de votre commune en fonction de leur finalité. Il existe différents types : les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles, les zones naturelles et forestières (2) ;

- définir les normes d'urbanisme applicables aux zones constructibles (et oui, c’est ce bout de papier qui vous empêche d’avoir des fenêtres ovales ou une maison rose) ;

- identifier certains éléments qui feront l’objet de dispositions de protection particulières, notamment les arbres et c'est là que cela devient intéressant (3).

Grâce à ce dernier point, le PLU permet de protéger certaines zones, d’interdire la destruction ou l’exploitation de celles-ci en les répertoriant en tant qu’Espaces Boisés Classés.

 

Les Espaces Boisés Classés, une véritable petite pépite au service de la Vie

 

Les Espaces Boisés Classés (ou EBC), qu’est-ce que c’est ?

Les EBC sont un dispositif foncier qui permet de classer dans le PLU « les bois, les forêts, les arbres isolés, les haies ou réseaux de haies ou les plantations d'alignements » comme étant des « espaces à conserver, à protéger ou à créer » (3). Concrètement, ce label interdit « tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements » (4).

 

Les espaces boisés classés sont donc des zones bénéficiant d’une protection particulière. Ce classement permet de les prémunir contre la destruction ou l’urbanisation et favorise le reboisement d’une commune. Les EBC sont donc de véritables outils en faveur de la biodiversité.

 

La loi étant bien pensée, les éléments naturels pouvant bénéficier d’une telle protection sont nombreux. Il peut s’agir :

- de parcs, forêts, espaces boisés, … ;

- d’éléments spécifiques tels qu’un arbre, une haie ;

- d’alignements d’arbres (ceux-ci peuvent notamment permettre une coupure d’urbanisation ou une protection contre les nuisances sonores) ;

- d’espaces verts qu’il convient de maintenir pour des enjeux écologiques , paysagers ou touristiques ;

- d’une prairie, d’une zone ouverte ou encore non boisée si l’objectif d’un tel espace est l’évolution naturelle vers le boisement (5).

 

Le classement en EBC, quelles conséquences ?

 

Une série de règles va venir encadrer la gestion de ces petits havres de paix :

- les coupes et abattages d’arbres y sont interdits ou soumis à déclaration préalable auprès de la commune, sauf en cas d'état sanitaire dégradé, de risque avéré pour la sécurité des biens / des personnesou d’enlèvement de bois morts et d’arbres déracinés (6);

- le défrichement y est prohibé (7);

- cet emplacement n’ayant pas vocation à être urbanisé ou imperméabilisé, les constructions n’y sont pas autorisées (8);

- en cas de disparition d’un arbre du fait de l’homme ou d’une cause naturelle, il pourrait être exigé de le replanter.

 

Les EBC sont donc des zones sur lesquelles la protection de la nature prime sur la liberté d’action de l’être humain.

 

Qui a la charge de veiller sur ces lieux ?

 

La gestion des espaces boisés classés est de la responsabilité des collectivités territoriales. Les communes, les départements ou les régions auront pour mission de protéger et de valoriser ces espaces naturels en mettant en place des mesures de préservation et de gestion spécifiques.

 

Quand et comment pouvez-vous agir pour classer des espaces végétales en tant qu’EBC dans le PLU de votre commune ?

 

C'est au moment de la période d'élaboration, de révision ou de modification du PLU de votre commune que vous devrez agir en indiquant à votre mairie qu'une zone peut faire l'objet d'un classement en EBC.

En effet, durant cette période, la mairie est obligée d'organiser une concertation publique et de récolter l'avis de ses habitants. C'est à cet instant que, vif et vigilant comme un renard, vous devrez vous rendre aux réunions publiques programmées à cet effet et remplir les éventuelles enquêtes publiques proposées dans ce cadre en indiquant les espaces dignes d’une éventuelle protection. Evidemment, si vous êtes propriétaire de beaux espaces naturels, vous pouvez spontanément proposer leur classement.

 

Quels arguments utilisés afin de convaincre votre conseil communal ?

 

Voici une série d’arguments que vous pourrez invoquer pour appuyer votre demande et convaincre les esprits chagrins :

 

- Les EBC favorisent la préservation de la biodiversité : Ces zones constituent des habitats naturels pour de nombreuses espèces (végétales ou animales) en voie de disparition.

- Les EBC assurent un cadre de vie agréable : Ces petits havres de paix sont des lieux de promenade et de loisirs permettant aux humains de se ressourcer et de profiter de la nature.

- Les EBC luttent contre l’urbanisation : La protection des espaces verts empêche l’extension des zones urbaines, la bétonisation de notre belle planète et réduit les risques d’inondation.

- Les EBC améliorent la qualité de l’air, favorise la réduction du bruit et régule le climat : Au risque de dire une litote : les arbres jouent un rôle essentiel dans la purification de l’air car ils absorbent le dioxyde de carbone et produisent de l’oxygène.

 

Et puis, comme dirait Rûmi, « la rose est un jardin où se cachent des arbres » … En partant de cela, imaginez tout ce que vous pourriez protéger grâce à ce système.

Au plaisir d’arpenter vos EBC !

 

En résumé, pour créer un EBC :

- Je balise et détermine une zone que j’aimerais protéger ;

- Je me renseigne auprès de ma commune sur son statut actuel (zone urbaine, agricole, naturelle, forestière, niveau de protection actuel, …) ;

- Je me renseigne sur la qualité de son propriétaire (commune, particulier, …) ;

- Au moment de la rédaction, révision ou modification du PLU de ma commune, je participe aux réunions et enquêtes publiques ;

- Je soumets mon idée et je convaincs mes voisins en utilisant la liste des arguments évoqués ci-haut ;

- Je sabre le kéfir lorsque ma zone est classée en EBC !

 

Pénélope Heimann

 

Juriste amoureuse de notre belle Planète, j’ai à cœur de montrer que le droit est un outil au service du vivant. Je souhaite à cet article de vous aiguiller et d’allumer en vous l’envie d’œuvrer pour la Vie et sa Beauté. Le long de ce chemin, puissiez-vous avoir pour guides l’Espoir, le Courage et la Curiosité :)

 

 

(1)Art. L. 123-4 du Code de l’urbanisme

(2)Art. L. 123-1 7° du Code de l’urbanisme

(3)Art. L. 130-1 du Code de l’urbanisme

(4)Art L.130 -2 du Code de l’Urbanisme

(5) En sont donc exclus, les pelouses, prairies et milieux ouverts et semi-ouverts à conserver en l’état

(6) Art. L. 421-4 du Code de l’Urbanisme, décision du Conseil d’État du 6 octobre 1982 et article R.*421-23 du code de l’urbanisme.

(7) Art. L 341-1 du Code Forestier « Est un défrichement toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière. Est également un défrichement toute opération volontaire entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences ».

(8) Et ce, même si la construction projetée ne requiert aucune coupe d'arbre (CA Nantes, 28 octobre 1998, n° 96NT02124, Société les Haras du Val-de-Loire).